La teinture végétale textile, c’est tout simplement le fait d’exploiter les molécules colorantes des plantes pour teindre des fibres naturelles. Facile non ?
Alors oui, mais non….
Teindre avec des plantes nécessite de connaître le végétal. Quelles parties utiliser, quand et comment les récolter ? Comment les conserver si besoin ? Mais aussi comment en extraire les molécules tinctoriales et comment les cueillir tout en préservant les ressources naturelles.
Cela nécessite aussi de connaître les fibres textiles que l’on souhaite teindre. Comment vont-elles réagir aux colorants ; comment les préparer ; comment préserver leur beauté et les entretenir….
Et également un peu de chimie… Comment les molécules tinctoriales vont-elles se comporter selon leur environnement ? Quelle(s) couleur(s) vont-elles donner, seront-elles solides dans le temps ? Comment les fixer, les nuancer, les conserver…
Et au-delà de tout cela, teindre des tissus avec des plantes nécessite surtout beaucoup d’expérimentations, d’apprentissage, de tests et d’essais !
Dans la partie “à propos” du site, je vous présente rapidement les différentes étapes nécessaires à l’obtention d’un tissu teint de façon naturelle. Vous l’avez déjà sûrement lu ! Si cela a titillé votre curiosité, je vous en dis un peu plus juste après 🙂.
La petite histoire de la teinture naturelle…
Je ne vous ferai pas ici un cours magistral (et je n’en ai pas la prétention) mais vous pouvez trouver moultes sources passionnantes concernant l’histoire de la teinture naturelle.
– petit aparté : connaissez-vous la différence entre teinture naturelle et teinture végétale ? La teinture végétale n’utilise que les molécules tinctoriales issues des plantes, des végétaux. La teinture naturelle, elle, englobe également l’utilisation de molécules colorantes issues d’autres matériaux, notamment d’origine animale comme la cochenille. –
Depuis des lustres les matières naturelles ont été source de couleur pour l’homme. Dès la préhistoire, les premiers hommes ont utilisé les pigments extraits de terres ou de minéraux pour peindre sur les parois des grottes, les pots & les peaux. Puis au cours des diverses civilisations et notamment à l’époque médiévale, les étoffes étaient teintes naturellement… En fait, la nature a été la source de couleur principale pour l’homme tout simplement jusqu’à l’arrivée des colorants de synthèse au début du siècle dernier. Petit à petit, ce savoir-faire s’est fait de plus en plus discret, jusqu’à ne plus être maîtrisé que par une poignée de personnes.
Aujourd’hui, ce savoir-faire ancestral retrouve peu à peu sa place dans nos vies quotidiennes, et de nouveaux pratiquants de la teinture végétale textile se dévoilent petit à petit. Ce, notamment, grâce à l’envie de beaucoup de retourner aux sources, de se rapprocher du naturel et de tenter de s’éloigner de l’industrie pétrochimique et de la consommation de masse (le raccourci est un peu rapide, mais dans l’idée, je pense que vous serez d’accord avec ce propos). Mais aussi et surtout grâce au talent de quelques artisans formidables qui gardent et transmettent ce savoir-faire par le biais de formations, de stages et d’ouvrages passionnants – que j’ai dévorés et que je dévore encore.
Je suis fière à présent de pouvoir apporter ma petite pierre à l’édifice en pratiquant cet artisanat à mon échelle et en vous proposant des articles en textiles naturels teints et imprimés à l’aide de végétaux..
Quelles sont les fibres textiles utilisées pour la teinture végétale ?
La nature est bien faite. Qui dit teinture naturelle, dit fibre textile naturelle : seules les fibres naturelles peuvent être teintes naturellement. Cela est dû à leur composition moléculaire. Il existe des fibres d’origine animale d’un côté, comme la laine et la soie qui sont constituées principalement de protéines. A l’opposé, les fibres d’origine végétale, comme le coton, le lin ou le chanvre sont constituées de cellulose. Chacune de ces matières textiles réagissent de façon différente à la teinture végétale et les tonalités obtenues varient, de la plus subtile à la plus intense.
Comment préparer les fibres textiles ?
Avant de pouvoir teindre les fibres, il va falloir passer par deux étapes essentielles de préparation : le récurrage et le mordançage.
- Le récurrage consiste à éliminer toutes les substances pouvant être présentes dans la fibre brute, comme la lanoline - la graisse de la laine de mouton - ou la cuticule des fibres de coton. ou ajoutées lors du tissage. Ces substances empêcheraient les colorants naturels de bien se fixer à la fibre. Pour cela, nous devons laver soigneusement les fibres à l’aide de savon et parfois de cristaux de soude.
- Le mordançage consiste à créer un “pont” entre les molécules protéiques ou cellulosiques de la fibre textile et les molécules tinctoriales issues des plantes. Sans cela, certaines teintes seraient moins marquées, moins solides. Même si l’on peut s’en passer avec certains colorants végétaux dits “grands teints”, il reste indispensable avec la plupart des colorants naturels. Le mordançage des fibres reste toujours bénéfique dans tous les cas. Il existe plusieurs approches pour le réaliser. La plus classique aujourd’hui consiste à faire tremper (et/ou chauffer) les fibres textiles dans un bain d’alun. Il est également possible d’utiliser des protéines, comme celles contenues dans le lait de soja. Dans le temps - et encore dans certains pays - des ions métalliques comme le chrome et l’étain, hautement toxiques et aujourd’hui interdits, étaient utilisés.
La préparation du bain de teinture végétale
Après avoir récolté soigneusement les parties des plantes souhaitées – toujours en cueillette raisonnée pour ne pas épuiser ou déséquilibrer la flore – on les pèse et on les découpe pour réaliser le plus souvent une décoction. La décoction consiste à faire frémir les végétaux préparés dans de l’eau. On laisse ensuite refroidir pour parfaire l’extraction des molécules colorantes. Dans certains cas, des étapes préalables de trempage, macération ou même fermentation peuvent être nécessaires. On peut également faire plusieurs décoctions successives.
Quand la décoction est prête et que le bain est bien chargé en molécules colorantes, on peut filtrer le bain et passer à l’étape de la teinture végétale proprement dite.
La teinture des fibres textiles
Ca y est, on y est ! Dans certains cas, cela fait déjà plusieurs jours que nous préparons tout pour arriver à cette étape tant attendue.
Les fibres textiles, préalablement mises à tremper plusieurs heures auparavant pour être bien hydratées, sont enfin plongées dans le bain de teinture filtré. On chauffe délicatement jusqu’à la température souhaitée, plus ou moins longtemps selon l’effet souhaité…
On prend soin de remuer régulièrement, d’éliminer les bulles, de surveiller le niveau de l’eau…. Quand la couleur désirée est obtenue, on peut sortir le tissu de la marmite, l’essorer, le rincer et le mettre à sécher.
Dans certains cas, on pourra procéder après le bain à un nuançage au fer pour obtenir des teintes différentes : des teintes plus éteintes ou plus foncées selon les cas. Quoi qu’il en soit, avec une même plante, selon la fibre et sa préparation, mais aussi selon la période et le lieu de récolte, le temps qu’il (a) fait, la quantité de plantes, etc. la teinte obtenue est toujours unique et nous réserve même parfois des surprises ! C’est la magie de la nature…
Vous savez maintenant (presque) tout sur la teinture végétale textile !
Venez me dire en commentaire si vous connaissiez déjà certaines étapes ou si vous en avez appris certaines.
Maintenant, il ne vous reste plus qu’à vous laisser porter par la nature et découvrir les teintes uniques qu’elle nous réserve en allant flâner sur la boutique en ligne ou la page instagram